En géométrie fractale, la dimension fractale, D, est une grandeur qui a vocation à traduire la façon qu'a un ensemble fractal de remplir l'espace, à toutes les échelles. Dans le cas des fractales, elle est non entière et supérieure à la dimension topologique.

Ce terme est un terme générique qui recouvre plusieurs définitions. Chacune peut donner des résultats différents selon l'ensemble considéré, il est donc essentiel de mentionner la définition utilisée lorsqu'on valorise la dimension fractale d'un ensemble. Les définitions les plus importantes sont la dimension de Hausdorff, la dimension de Minkowski-Bouligand (ou "box-counting"), et la dimension de corrélation.

Dans le cas d'ensembles fractals simples (auto-similarité stricte, notamment) on conjecture que ces définitions donnent des résultats identiques.

Par abus de langage, on trouve parfois le terme "dimension fractale" pour désigner des grandeurs non géométriques telles que l'exposant de lois de puissance dans des lois de distribution statistiques ou des séries temporelles, invariantes d'échelle, notamment en finance.

Approche didactique

Les figures géométriques usuelles ont une dimension entière :

  • La dimension D d'un segment, d'un cercle et d'une courbe régulière est de 1. Sa longueur est multipliée par 2 = 2 1 {\displaystyle 2=2^{1}} lorsque sa taille double.
  • La dimension D d'une surface simple et bornée est de 2. Elle a une aire finie et cette aire est multipliée par 4 = 2 2 {\displaystyle 4=2^{2}} lorsque sa taille double.
  • La dimension D d'un volume simple et borné dans l'espace est de 3. Il a un volume fini et ce volume est multiplié par 8 = 2 3 {\displaystyle 8=2^{3}} lorsque sa taille double.

Si D est la dimension d'un objet, alors la mesure de cet objet est multipliée par n D {\displaystyle n^{\mathrm {D} }} lorsque la taille de cet objet est multipliée par n {\displaystyle n} .

Or, par exemple, la longueur de la courbe de Koch est multipliée par 4 lorsque sa taille triple (en effet, cette courbe est précisément définie comme étant constituée de quatre copies d'elle-même, trois fois plus petites). Puisque 4 3 1 , 26 {\displaystyle 4\approx 3^{1,26}} , on peut considérer intuitivement qu'il s'agit d'un objet de dimension D 1 , 26 {\displaystyle \mathrm {D} \approx 1,26} (plus précisément, D = log ( 4 ) / log ( 3 ) {\displaystyle \mathrm {D} =\log(4)/\log(3)} ). Il ne s'agit plus d'une simple courbe unidimensionnelle, ni d'une surface, elle se situe « entre les deux ». Cette « dimension fractale », non entière, est caractéristique des ensembles fractals.

Les principales définitions

Les définitions suivantes, les plus couramment rencontrées, abondent dans la littérature (voir les articles détaillés ou les références citées en fin d'article : Mandelbrot ou Falconer).

Autres définitions

Ces définitions sont plus rares dans la littérature. Elles sont utilisées dans des contextes spécifiques (théorie du chaos, par exemple).

Relations entre dimensions

On montre, dans le cas général, que : D t D c D i D H D box D d {\displaystyle D_{t}\leq D_{c}\leq D_{i}\leq D_{H}\leq D_{\text{box}}\leq D_{d}} ,, où :

D t {\displaystyle D_{t}} est la dimension topologique de l'ensemble
D c {\displaystyle D_{c}} est la dimension de corrélation de l'ensemble (Rényi d'ordre 2)
D i {\displaystyle D_{i}} est la dimension d'information de l'ensemble (Rényi d'ordre 1)
D H {\displaystyle D_{H}} est la dimension de Hausdorff de l'ensemble (ou dimension d'homothétie)
D box {\displaystyle D_{\text{box}}} est la dimension de Minkowski-Bouligand de l'ensemble
D d {\displaystyle D_{d}} est la dimension "divider" de l'ensemble

En cas d'autosimilarité stricte, on conjecture (Schroeder, 1991) que D H {\displaystyle D_{H}} et D box {\displaystyle D_{\text{box}}} sont égales.

Pour un attracteur, si chaque élément de l'attracteur a une probabilité identique d'être visitée, alors D i {\displaystyle D_{i}} et D box {\displaystyle D_{\text{box}}} sont égales.

Applications et limites

La mesure de la dimension fractale trouve des applications dans de nombreux domaines de recherche tels que la physique, l'analyse d'image,, l'acoustique l'analyse des zéros de la fonction de Riemann ou les processus électrochimiques.

L'estimation de la dimension fractale d'objets réels est très sensible au bruit et à la quantité de données disponible. On doit donc être prudent concernant la valeur obtenue.

Les définitions de dimension fractale présentées dans les sections précédentes s'entendent à la limite, lorsque ε tend vers zéro. Or cette limite n'est jamais atteinte dans le monde physique à cause des limites moléculaire ou quantique. Pour cette raison il n'existe pas d'objet physique fractal au sens strict.

La dimension fractale n'est, en pratique, calculée que sur un intervalle défini, généralement pour des valeurs de ε visibles (ou significatives vis-à-vis des propriétés que l'on souhaite étudier). On définira ainsi une dimension fractale apparente ou approximative.

La mesure d'une telle dimension fractale apparente utilise souvent la méthode de Minkowski-Bouligand ou méthode "box-counting" par comptage de boîtes. Elle consiste à

  • mesurer les valeurs de N ( ε ) {\displaystyle N(\varepsilon )} pour différentes valeurs de ε dans l'intervalle choisi,
  • puis porter ces valeurs sur un graphe donnant log ( N ( ε ) ) {\displaystyle \log(N(\varepsilon ))} en fonction de log ( 1 / ε ) {\displaystyle \log(1/\varepsilon )} . Si la figure est auto-similaire, ces points seront alignés,
  • enfin déterminer la pente de cette droite, ce qui donnera la valeur de la dimension fractale recherchée.

Cette restriction peut également concerner des constructions purement géométriques. À titre de contre-exemple, dans l'illustration ci-contre, on a défini une figure fractale paradoxale ayant l'aspect de la courbe de Koch mais ayant la dimension fractale de l'ensemble de Cantor : log ( 2 ) / log ( 3 ) {\displaystyle \log(2)/\log(3)} . Elle est construite à la manière de Koch sur les premières itérations, celles concernant des intervalles de longueur visible, mais continue à l'infini avec la construction de l'ensemble triadique de Cantor. Si l'on s'en tient à l'aspect visible, on peut considérer sa dimension fractale apparente, qui vaut celle de la courbe de Koch : log ( 4 ) / log ( 3 ) {\displaystyle \log(4)/\log(3)} , sur les intervalles de ε visibles.

Cet exemple illustre par ailleurs que dimension fractale et « rugosité » apparente, concept popularisé par Mandelbrot, ne vont pas toujours de pair.

Voir aussi

  • Liste de fractales par dimension de Hausdorff

Notes

Références

  • Benoît Mandelbrot, Les Objets fractals : forme, hasard, et dimension, Flammarion,
  • Benoît Mandelbrot, Les Objets fractals, survol du langage fractal, Flammarion, 1975, 1984, 1989, 1995
  • (en) Benoît Mandelbrot, « How Long Is the Coast of Britain? Statistical Self-Similarity and Fractional Dimension. », Science, New Series, vol. 156, no 3775,‎ , p. 636-638 (DOI 10.1126/science.156.3775.636)
  • (en) Kenneth Falconer, Fractal Geometry : Mathematical Foundations and Applications, Chichester, John Wiley & Sons, 1990 & 2003, 2e éd., poche (ISBN 978-0-470-84862-3, LCCN 2004271361)

Liens externes

  • TruSoft's Benoit - Benoit, Programme d'analyse fractale.
  • Un document .pdf sur les définitions des dimensions fractales
  • Portail de la géométrie

Dimension fractale de la côte Bretonne. Plus l'échelle de l'outil de

Fractale3 Dimension Fractale

Kapitel 4 Fraktale und Dimension

Figure 1 from Fractal Dimension Semantic Scholar

3Blue1Brown Fractals are typically not selfsimilar